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Channel: Commentaires sur : Michel Onfray : « L’Occident attaque, prétendument pour se protéger, mais il crée le terrorisme »
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Par : Bof

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Joli exercice de Laurent Joffrin sur Libé …

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En réponse à Michel Onfray
Par Laurent Joffrin, directeur de la publication de Libération — 14 septembre 2015 à 12:37 (mis à jour à 12:37)
Dans une récente interview au «Figaro», le philosophe fait preuve d’un simplisme polémique inquiétant, un ralliement indirect aux obsédés de l’identité. Nous avons choisi de reproduire ses propos pour ensuite les commenter et les réfuter par des arguments rationnels.

En réponse à Michel Onfray

Michel Onfray file un mauvais coton. On écrit cela non dans un but polémique, mais, plus simplement, avec tristesse. Onfray est à coup sûr un homme sincère, un philosophe de qualité, un esprit courageux qui n’hésite pas à braver les conformismes. Quand beaucoup se contentaient de dénonciations verbales envers le Front national, il a lancé dans la région normande une «université populaire» qui demandait effort, engagement, désintéressement, et qui a déployé au plus près des villes et des villages, là où vit la vraie politique, une pédagogie démocratique incontestable et salutaire. On n’en est que plus attristé d’observer son évolution vers la zemmourisation ou la ménardisation, tous penchants qui, franchement, ne sont pas de son niveau et qu’il faut juger comme un inquiétant signe d’époque.

Non pas qu’il soit interdit de défendre telle ou telle idée, de passer de gauche à droite, de rendre des points à ses adversaires, de répudier ses amis intellectuels et politiques, ou encore de stigmatiser ses fidélités d’origine, toutes choses qui relèvent du classique débat d’idées. Non, la tristesse vient de ce qu’on décèle désormais, dans les propos du philosophe, un simplisme polémique inquiétant, un ressentiment étrange envers les idées de gauche, un ralliement indirect aux obsédés de l’identité, un mépris des faits et une méchanceté brutale qui ressemblent plus à un règlement de comptes avec son ancienne famille qu’à une évolution intellectuelle intéressante.

Pour étayer ces affirmations, qui demandent à être prouvées, nous allons nous livrer à un exercice que l’on peut trouver laborieux mais qui sera intellectuellement aussi honnête que possible et qui consiste à reprendre et à commenter les derniers propos du philosophe, tels qu’il les a livrés dans un entretien au Figaro paru le 10 septembre. Cet exercice demandera au lecteur un effort et un peu de temps, mais, après tout, n’est-ce pas salutaire quand on déplore partout le règne du zapping, de la petite phrase et du clinquant médiatique ?

Citons donc les propos du philosophe, sans les tronquer, pour ensuite les commenter et – c’est du moins le but poursuivi – les réfuter par des arguments factuels et rationnels. Les questions sont du Figaro, les réponses de Michel Onfray, les commentaires de l’auteur de cet article.

Le Figaro. L’insoutenable photo de l’enfant kurde mort sur une plage de Turquie a conduit François Hollande à modifier la position de la France sur la crise des migrants. Que cela vous inspire-t-il ?
Michel Onfray. Penser une photo est déjà la chose la plus difficile qui soit car on ignore tout de ce qui a présidé aux intentions et au geste du photographe : pourvu qu’elle soit bonne, une photo est toujours une idée. De plus, on sait qu’à l’ère numérique, une photo peut être une manipulation à la portée du premier venu. On ne sait donc jamais si une photo est ce qu’elle dit a priori ou ce que la légende lui fait dire. Il existe des détournements célèbres par les légendes. Ce que l’on sait, c’est que dans notre monde où n’existe plus que ce qui est montré dans un média, une photo bien légendée fait plus qu’un long discours argumenté.

La réponse de Laurent Joffrin :
Il est certes utile de rappeler que les images sont ambiguës, qu’elles peuvent frapper les esprits mieux qu’un long texte, qu’elles doivent être prises avec toutes les précautions d’usage (ce que disent tous ceux qui réfléchissent un tant soit peu au rôle de l’image depuis quelques siècles). Mais Onfray va nettement plus loin que cette banalité : il suggère avec insistance que la photo de cet enfant mort pourrait être truquée, manipulée par des moyens numériques ou que son sens aurait pu être altéré par une légende biaisée. Or, chacun peut vérifier qu’il n’en est rien. On a su très vite que la photo avait été diffusée par une agence de presse turque dont c’est la fonction, qu’elle a été prise sans aucune volonté de truquer la réalité et que cette réalité est bien celle qu’on a dite : cet enfant s’est noyé après que l’embarcation où sa famille avait pris place pour rejoindre Kos en Grèce de Bodrum en Turquie a chaviré.
Il suffisait, pour répondre à la question du Figaro, de se renseigner (sur Internet, par exemple, où des articles sérieux donnent les informations nécessaires). Pourquoi, dès lors, Onfray agite-t-il le spectre d’une manipulation que rien n’étaye ? Etrange évocation d’une fantomatique hypothèse de complot… Est-ce sérieux, est-ce rationnel ? Ou bien Onfray, gêné par l’effet supposé de la photo – une émotion compassionnelle qui incitera les gouvernants à accueillir plus de migrants – veut-il, sans trop y penser, saper cet enchaînement de causes et d’effets qu’il redoute, en jetant le discrédit sur une photo émouvante et vraie ? A-t-il réfléchi au fait que la mise en cause systématique des «versions officielles», des «émotions médiatiques», des «discours dominants» est une modalité permanente de la rhétorique complotiste selon laquelle des forces obscures manipulent par définition la conscience publique ?

Jeter le doute sur la photo du petit Aylan, c’est suggérer que sa diffusion est un acte de propagande subreptice destiné à faire accepter aux opinions occidentales quelque chose d’essentiellement néfaste, c’est-à-dire l’accueil des réfugiés, qui satisfera «les bobos bien-pensants» mais portera atteinte aux intérêts de la nation. Le Figaro, trop content, poursuit évidemment dans la même veine, qui consiste à affirmer que la pitié envers le petit enfant est en fait une réaction naïve, trompeuse, inconséquente, parce qu’elle obscurcit la nécessité de l’heure : limiter le plus possible une immigration dangereuse pour la France, camouflée sous la circonlocution pompeuse «les véritables enjeux géopolitiques contemporains».

La suite sur Libé …


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